Ponzino est né au début des années nonante (quatre-vingt-dix) dans la belle ville de Pontarlier, en Franche-Comté.
Après une enfance heureuse, il quitte ses études pour gagner sa vie et trouve une place de travail dans une manufacture horlogère de l’autre côté de la frontière.
“Les Suisses sont trop lents, c’est trop cher et il n’y a rien à y faire” répondait Ponzino à ceux qui osaient lui demander pourquoi il s’acharnait chaque jour au volant de sa Peugeot entre Pontarlier et Bienne.
En avril 2020, bloqué chez lui à cause d’un virus, il découvre une opportunité d’investissement sur son fil TikTok. Grâce aux économies réalisées ses dernières années, il achète pour 10,000 euros de bitcoins au cours de 6,670 euros. “La monnaie du futur” qui ira to the moon, selon un expert TikTok.
Et il ne s’est pas trompé. Fin 2020, le cours du bitcoin est passé à 26,493 euros. Ses 10,000 euros se sont transformés en presque 40,000, en plus des six mois du salaire qui a continué de tomber grâce aux aides reçues du pays lent et ennuyeux.
“Je quitte mon travail et je deviens trader” avait affirmé début 2021 le jeune loup à sa compagne, Buffetta.
Comme tout bon trader, il fait des recherches et décide donc d’investir 10,000 euros de plus dans une autre crypto d’avenir: le Dogecoin, dont il en acquiert plus de 434,000 le 29 janvier au cours de 0.023 euros.
Au 30 avril 2020, Ponzino, qui a entretemps fait quelques transactions sans impact sur son portefeuille, est assis sur une petite fortune grâce à sa performance de 956%.
A côté des cryptos, il a également acquis deux actions prometteuses: AMC et Tesla.
“Dans une année, je pourrai trader des cryptos au volant d’une Tesla en allant au cinéma” faisant référence aux promesses de son idole, Elon Musk.
Plusieurs de ses amis étaient impressionnés par ses performances et se mirent également à devenir trader. Pourquoi donc s’ennuyer à travailler de 9 heures à 17 heures quand il suffit d’acheter des cryptomonnaies? D’autant plus que l’offre ne manque pas de s’agrandir, le nombre de cryptomonnaies étant passé d’un peu plus de 2,000 à la fin 2019 à plus de 10,000 à ce jour.
A côté de son activité de trader, Ponzino a développé une nouvelle passion: le métavers.
En mai 2021, impressionné par les graphismes futuristes dignes du début des années nonantes (quatre-vingt dix) de cet univers qui allait révolutionner no vies post-covid, il acquiert une lunette Oculus avec les économies effectuées notamment grâce à la première annulation depuis 12 ans de ses vacances annuelles à Palavas-les-Flots.
Il se retrouve alors rapidement dans le monde des NFT, dont il identifie immédiatement les nombreuses opportunités et décide d’acheter un Ape pour la modique somme de 0.24 ETH (EUR 720).
Ponzino avait changé. Il passait la plupart de ses journées derrière ses lunettes Oculus. Buffetta ne reconnaissait pas son Apollon, rencontré dix ans plus tôt lors d’une soirée dans une boîte de nuit lausannoise, Le Red Club.
Elle ne s’intéressait que peu à ce nouvel univers mais restait informée. Dernièrement, elle s’inquiétait régulièrement en voyant des nouvelles ressemblant souvent à des blagues, dont cet article paru le 14 février 2022 dans Le Temps:
Heather Morgan n’est pas seulement une rappeuse qui fait un peu mal aux oreilles. Dans son morceau Versace Bedouin – une chanson «pour les entrepreneurs», l’Américaine de 31 ans se présente aussi comme économiste, journaliste, écrivaine, directrice générale, et quelques autres choses encore. Femme aux talents décidément multiples, l’autoproclamée «crocodile de Wall Street» a été arrêtée le 8 février dernier à New York, soupçonnée d’avoir tenté de blanchir pour 4,5 milliards de dollars de bitcoins volés. Assez normal finalement, pour l’auteure d’un article expliquant «comment devenir un expert en tout en trois étapes» sur le média en ligne Inc.com (qui l’a exclue de ses pages à la suite de son arrestation).
Innovante jusqu’au bout des ongles, Heather Morgan a révolutionné le blanchiment sur ce coup. Au lieu d’utiliser des cryptomonnaies pour dissimuler le produit de crimes commis dans le monde réel, elle et son mari Ilya Lichtenstein ont fait l’inverse: ils ont cherché à utiliser le système bancaire traditionnel pour blanchir des bitcoins hackés. Ce qui pose d’autres sortes de problèmes.
Les 119 754 bitcoins en question ont été volés en août 2016 par un hacker sur Bitfinex, une plateforme d’échange de cryptos. Le Département américain de la justice n’affirme pas qu’Heather Morgan ou son mari sont les auteurs de ce vol. On peut néanmoins se demander comment ils sont entrés en possession d’un tel magot, à moins que le hacker ne leur en ait fait don. Au moment du vol, ces bitcoins valaient 71 millions de dollars mais 4,5 milliards lorsque le DoJ a publié son acte d’accusation. Les limiers américains ont récupéré 94 636 de ces bitcoins, l’équivalent de 4,1 milliards de dollars au cours de vendredi, qui seront rendus aux victimes.
Suite à la lecture de cet article, elle s’adressa à Ponzino.
- “Ponzinou, je croyais que les bitcoins et les cryptos étaient insaisissables? Es-tu sûr que tes bitcoins et tes NFTs sont en sécurité?”
- “Ne t’inquiète pas chérie, je suis sur les meilleures plateformes. Et mon Ape est sur OpenSea, une des plus grandes plateformes d’échanges de NFT”.
Depuis, sa situation financière s’était quelque peu détériorée, ayant réinvestit des bitcoins en novembre 2021 suite à l’emballement du prix, ne voulant pas manquer l’opportunité d’en acheter à si bon prix. Certains experts prévoyant selon leur modèle d’astrologie un prix qui pourrait atteindre 1 million par bitcoin.
Un beau matin de février, comme chaque matin après avoir enlevé son masque Oculus pour s’endormir au milieu de la savane et avant d’aller aux toilettes, il regarde son fil d’actualité Twitter.
Le cœur de Ponzino s’emballa. Son ami Stefano s’était fait voler ses “chaussures” Adidas. La question de savoir s’il pourrait encore marcher dans le métavers étant alors vite dépassée par la perte de ses 1.2 ETH, l’équivalent de 2,300 euros ou une vingtaine de baskets Adidas avec lesquelles on peut marcher.
La boule au ventre, transpirant comme avant de voir le solde de sa carte bleue en se réveillant après une nuit au Red Club, il se connecte à son compte OpenSea pour voir s’il est encore l’heureux propriétaire de son Ape, qu’il avait entretemps renommé Panterplouc et dont il s’était promis qu’il ne le revendrait jamais…