“When you're good at something, make that everything” Roger Federer
Ça y est ! Roger Federer - Rodgeuuur pour les intimes - a pris sa retraite après avoir fait vibrer les fans de tennis et les ménagères de plus de 50 ans depuis le début du siècle.
Il éclipsait même pendant quelques minutes Elizabeth II, tant son impact sur le monde du tennis et de la publicité a été grand durant ces vingt dernières années.
Altruiste, Roger avait pensé à ses fans tout au long de sa carrière en signant des contrats qui leur permettait de lui ressembler au jour le jour : un compte au Credit Suisse, un abonnement de téléphone chez Sunrise, une machine à café Jura, un rasoir Gillette et des pâtes Barilla afin d’économiser sur la nourriture et de pouvoir s’acheter une Rolex, idéalement avant 50 ans.
Rodgeur n’est pas seulement un maître du coup droit et des relations publiques, mais également un investisseur “co-entrepreneur”, ce que nous ré-ré-réapprenait l’Agefi dans un article qui à lui seul fait valoir le prix de l’abonnement :
Roger Federer a également diversifié ses placements en investissant dans des entreprises. Depuis 2019, il est notamment actionnaire de On Running. La marque de sneakers zurichoise est cotée depuis septembre 2021 à Wall Street.
Quelques heures plus tôt, une autre nouvelle venait faire parler d’elle chez les équipementiers sportifs, reportée ici dans le New York Times:
Half century after founding the outdoor apparel maker Patagonia, Yvon Chouinard, the eccentric rock climber who became a reluctant billionaire with his unconventional spin on capitalism, has given the company away.
Rather than selling the company or taking it public, Mr. Chouinard, his wife and two adult children have transferred their ownership of Patagonia, valued at about $3 billion, to a specially designed trust and a nonprofit organization. They were created to preserve the company’s independence and ensure that all of its profits — some $100 million a year — are used to combat climate change and protect undeveloped land around the globe.
En laissant de côté les qualités (ou pas) techniques des chaussures (On pour se la jouer à la Bahnhofstrasse, Patagonia pour aller marcher le long des bisses), voici ci-dessous quelques pistes de réflexion pour la prochaine fois où vous chercherez chaussures à vos pieds.
En achetant un bien ou un service vous transférez votre capital en échange d’une prestation.
Ce revenu permet à l’entrepreneur de couvrir ses charges, générant ainsi trois cas de figures principaux :
Le chiffre d’affaires est nettement supérieur aux charges, générant des “superprofits” et donc la foudre des gouvernements et de l’opinion publique ;
Le chiffre d’affaires est supérieur aux charges dans une limite acceptable par cette même opinion, les profits sont à libre disposition des actionnaires ;
Le chiffre d’affaires est inférieur aux charges et l’entreprise, générant ainsi la sympathie de l’opinion publique bien qu’elle ne génère aucune recette fiscale au bénéfice de la collectivité et est vouée à la faillite à terme.
Patagonia étant une entreprise privée détenue jusqu’ici par Yvon Chouinard, les données sont limitées. Toutefois, si l’on se base sur les informations disponibles, la marque entre dans la catégorie 2 ci-dessus avec ses 100 millions de dollars de bénéfice annuels.
Dans le cas précis, son actionnaire a décidé que les profits seraient à présent entièrement mis au service de la lutte contre le changement climatique et la protection de la planète.
Les mauvaises langues diront que c’est pour ne pas payer d’impôts, dont Bloomberg , qui devrait se concentrer sur ses terminaux hors de prix plutôt que de publier des titres trompeurs : Yvon Chouinard ne paie pas d’impôt car il ne réalise pas de gains en capital sur la vente de sa société.
Si vous n’êtes pas convaincu, donnez votre fortune à une ONG de votre choix, vous économiserez également des impôts.
On Holding AG étant quant à elle cotée en bourse, des informations plus détaillées sur la structure du groupe et ses résultats sont disponibles.
Avec CHF 63 millions de profits après 6 mois, les profits annuels devraient également être aux alentours des 100 millions de dollars.
Regardons à présent à quelles fins pourront être utilisés les profits 2022.
Malheureusement, les dirigeants n’ont pas manqué d’envoyer On dans la catégorie 3 présentée ci-dessus, ceci grâce aux stocks options - “shared-based compensation” - qu’ils se sont attribués.
Mais attention, ces mêmes dirigeants “ne considèrent pas que ces dépenses reflètent la performance opérationnelle du business” et vous présente donc un EBITDA ajusté positif.
Malheureusement pour Roger et les autres actionnaires, ces compensations sont bien des charges selon les normes comptables internationales et contribuent donc à une perte en 2021.
Les profits de 2022 serviront ainsi - s’il n’y a pas de nouvelles charges similaires en 2022 - à éponger une partie des pertes cumulées des années précédentes.
Il n’y aura donc sûrement pas de dividendes cette année pour Roger. Mais combien aurait-il droit si les dirigeants s’étaient un peu moins payés et avaient pris un peu plus soin du service client?
Selon les informations publiées et s’il n’a pas vendu ses parts (sa transparence en tant que co-entrepreneur n’est pas aussi limpide que son revers) sa participation est inférieure à 5%, ce qui pourrait toutefois représenter quelques 500 millions de dollars avec une capitalisation à ce jour d’un peu plus de 11 milliards de dollars.
On ne s’en fait donc pas pour lui qui aura certainement de quoi payer ses factures, Roger était en effet bon dans deux domaines : le tennis et les affaires.
Reste à savoir s’il suivra l’exemple d’Yvon Chouinard et donnera tout ou une partie pour la planète.
Service à suivre.