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Ce début d’année avait été comme Ponzino les aime : ses investissements voyaient le vert et en bon trader qui se respecte, il préférait fêter les petits succès plutôt que de s’attarder sur ses pertes de l’année précédente.
Ce rebond lui redonna confiance. L’absence de neige cumulée à l’attente de l’été le décida de s’en aller quelques mois travailler en “remote” depuis le Salvador, endroit prisé par les traders de cryptomonnaies.
En quelques instants, il tapota “Salvador” sur Google Flight, paya son billet et, excité à l’idée de cette nouvelle aventure, partagea l’annonce avec son réseau LinkedIn.
"Il y a 3 ans, au début de la pandémie, je prenais la décision courageuse de quitter la Suisse et un salaire de 68,25k pour me lancer dans les cryptomonnaies.
La vie est trop courte pour passer son temps à enrichir son employeur alors que la finance décentralisée permet de répartir la richesse entre tous.
Les trois dernières années ont certainement été les plus enrichissantes de ma vie. J'ai rencontré des personnes formidables qui m’ont initiées aux utilisations révolutionnaires et quasi infinies des cryptomonnaies.
J’ai donc pris la décision de quitter une vie confortable à Pontarlier pour aller travailler là où le progrès est bien réel.
Dès la semaine prochaine, suivez mes aventures de traders de cryptomonnaies depuis Bitcoin Beach, au Salvador"
Tellement excité, Ponzino n'en avait pas encore parlé à sa compagne qui avait appris la nouvelle en scrollant son fil d’actualité de l’application préférée des narcissistes.
"Tu pars sans me dire Ponzino ?"
"Ce n'est que temporaire, ma chérie" répondit-il à Buffetta.
Les cheveux de Michel Michel - l’auditeur passionné - était douloureux en ce vendredi matin. Il avait comme l'impression d'avoir mangé un terrain de pétanque le soir d'avant.
Quelques heures plus tôt, il était en effet dans un état d'euphorie alors qu'il partageait un dernier verre avec ses collègues après dix années qui avaient laissées quelques traces.
Les pots de départ d'auditeurs sont en général essentiellement pris d’assaut par de jeunes recrues, profitant de l’occasion de s'éloigner un instant de leur ordinateur avant de se reconnecter quelques heures afin de finaliser une réconciliation qui ne pouvait pas attendre le lendemain.
Pour Michel Michel, cela n’était plus qu’un souvenir.
Après quelques explications dues à Buffeta, Ponzino était prêt pour le grand départ.
Si le paquetage de quelques t-shirts ne lui avait pas pris beaucoup de temps, il avait pris grand soin de ses cryptomonnaies et de son masque oculus qui ferait le voyage en cabine avec lui.
Alerté par les mauvaises surprises que de nombreux amateurs de cryptomonnaies avaient subi ces derniers 12 mois, il avait pris certaines précautions afin de sécuriser celles-ci.
En effet, il avait transféré une part importante de ses bitcoins et autres cryptomonnaies dans un coffre-fort numérique, un wallet physique, permettant de conserver les clés privées des utilisateurs en toute sécurité à l’aide de différents codes :
Comme à l’accoutumée, les cryptomonnaies et la décentralisation permettent de faire un bond en avant au niveau des technologies. Dans le cas précis, de tout perdre avant même que le cours de vos cryptomonnaies atteigne 0 en perdant vos codes.
Il avait donc soigneusement écrit ses 24 mots de sécurité sur un papier dans le cas où il les oublierait.
PANTERPLOUC MEILLEUR AMI NFT POUR LA VIE ENSEMBLE NOUS ALLONS AU SALVADOR ET NOUS REVIENDRONS PLUS FORT RICHE ET CELEBRE A NOUS BITCOIN BEACH
Il prit une photo et glissa le papier au fond de sa table de nuit.
Assis sur son siège 44D et fier de débuter cette nouvelle aventure, Ponzino fit un selfie qu'il partagerait sur LinkedIn dès qu’il aurait à nouveau une connexion internet.
Il mit alors son masque oculus afin de débuter l’aventure avec son NFT Panterplouc.
C'était sans compter sur l'interruption d'un membre du personnel de cabine.
"Monsieur, nous allons décoller, veuillez s’il vous plait retirer vos lunettes"
Libre de toute obligation envers son ex-employeur, Michel Michel avait décidé de prendre une année sabbatique. Il débutera son voyage en Amérique latine.
A l'instar de Ponzino, il n'avait pas prévu de trader des cryptomonnaies mais de se déconnecter et de bien profiter de ne plus devoir reporter ce qu'il fit pendant chaque quart d’heures durant la dernière décennie.
"Cabin crew, prepare for departure"
13 heures plus tard, il sera à São Paulo.
Le vol TP22 avait atterri à l'heure. Ponzino avait prévu un transfert privé afin de se rendre directement à El Zonte, rebaptisé Bitcoin Beach par ses pairs.
Il avait appris quelques mots d'espagnol qu'il répéta fièrement à l'agent d'immigration qui lui demanda la raison de sa visite.
"Ola, bitcoin beach" s'exclama Ponzino
"I don't know this place. Can you show me your reservation" répondit l'agent.
Ponzino n'était guère surpris, un agent d'immigration ne travaillerait pas en tant qu'agent d'immigration s’il connaissait les cryptomonnaies.
Ponzino montra alors fièrement sa réservation.
L'agent, après avoir regardé attentivement les documents fixa Ponzino avec un sourire amusé :
"Sir, you are in Salvador de Bahia. Bem-vindo ao Brasil!"
Incrédule, Ponzino réalisa alors qu’il était à des milliers de kilomètres de sa destination.