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La chute des cryptos et les mésaventures sur ses investissements avaient finalement forcé Ponzino à passer ses vacances d’été une fois de plus dans un camping à Palavas-les-Flots, ce qui fit toutefois plaisir à sa compagne Buffetta.
Il partirait au Salvador une autre fois.
Ponzino n’avait pas de doute sur sa stratégie d’investissement et était convaincu que le bear market auquel il faisait face n’était que temporaire. Une occasion de renforcer ses positions.
Il s’était promis d’être dans les prochains bons coups, lui qui avait manqué la folie sur le titre GameStop. Cette saga où les internautes se sont tous mis ensemble pour faire tomber les méchants short seller qui anticipaient la faillite d’un business qui devait faire faillite.
Ils ont alors fait monter le cours de l’action à un tel point que son prix ne faisait plus aucun sens et la seule porte de sortie était de trouver le prochain pigeon.
Jusqu’à ce que l’application de trading Robinhood décide de supprimer le bouton “buy” ; les pigeons se faisant alors bien moins nombreux d’une minute à l’autre.
“Je vais tous les bouffer” se disait Ponzino devant le miroir, confiant en sa stratégie.
Une partie non négligeable de sa stratégie était de répliquer les tips du plus grand génie de tous les temps, son idole dont la photo trônait au-dessus du lit qu’il partageait avec Buffetta à Pontarlier : Elon Musk.
Ce n’est par hasard que le génie était dans tous les bons coups, lui qui avait poussé GameStop vers les sommets.
Alors, lorsque le sauveur s’exprimait lors des résultats du 3ème trimestre 2022 la semaine dernière, Ponzino n’hésita pas et doubla sa position sur Tesla.
Michel Michel - l’ancien auditeur qui avait tout plaqué - profitait de son temps libre. A côté de la préparation de son voyage, il prenait enfin le temps de lire les nouvelles et tomba sur le même titre qui avait poussé Ponzino à doubler la mise.
Michel Michel était jusqu’alors trop occupé à réconcilier des fichiers Excel et n’avait pas eu le temps de s’intéresser à l’actualité. Sans avis particulier sur Tesla et Elon Musk, il se fiait à ce qu’il en entendait : un génie milliardaire qui nous sauvera du réchauffement climatique grâce à ses technologies et la colonisation de nouvelles planètes.
Ce titre retenu tout de même son attention. Bien que Tesla vende 10 fois moins de voitures que Toyota, elle était déjà valorisée trois fois plus que le constructeur japonais ! Si Elon Musk considère que cette valeur pourrait dépasser les deux plus grosses capitalisations boursières au monde en fabriquant des voitures (et des robots révolutionnaires), Michel Michel était convaincu qu’il faudrait non seulement un tremblement de terre s’abattant sur Apple et Aramco mais également que Tesla multiplie ses ventes.
Les prévisions de croissance et d’ouverture d’usines doivent être abondantes, se dit alors Michel Michel ; Tesla devant vendre au moins 20 fois plus de véhicules afin d’atteindre les profits générés par Apple et Aramco.
Il fit donc pour le moins surpris de constater que les constructions en cours à fin septembre représentait des milliards dans les usines ouvertes en grandes pompes des mois auparavant et non de nouvelles usines en construction pour multiplier les ventes nécessaires pour dépasser Apple et Aramco.
A moins que cela consiste en des coûts de production qui auraient sinon dégradé les marges du troisième trimestre ? Un génie ne ferait pas ça, se dit Michel Michel, mais est-il possible de réaliser de telles marges avec des usines ne tournant pas à plein régime ?
Et si l’objectif était en fait le même que ceux qui ont fait flamber le cours de l’action GameStop, se demanda-t-il. Pumper le prix de l’action par des annonces fracassantes, trouver des pigeons, vendre ses actions. Avec une cerise sur le gâteau : acheter Twitter.
Assis sur son siège de gamer-trader Sparco en face de ses trois écrans, c’est presque la larme à l’œil que Ponzino regardait son idole conquérir les bureaux de Twitter, un évier à la main. Il avait révolutionné les voitures électriques, les paiements et les voyages interplanétaires. Il allait maintenant rendre les réseaux sociaux un espace de discussion pour tous.
A quelques kilomètres de là, de l’autre côté de la frontière, Michel Michel ouvrait son ordinateur un café à la main et lisait le titre suivant sur le site de Reuters :
Il se demanda alors comment une société pouvait à la fois dépasser les deux plus grosses capitalisations boursières au monde alors que son CEO déploie ses efforts sur un réseau social payé bien trop cher quand la société qu’il dirige actuellement semble faire face non pas à une enquête du département de la justice américaine, mais à trois, selon Reuters:
The Justice Department’s Autopilot probe is far from recommending any action partly because it is competing with two other DOJ investigations involving Tesla, one of the sources said. Investigators still have much work to do and no decision on charges is imminent, this source said.
D’autant plus qu’Elon Musk l’a dit lui-même : Tesla sans autopilote ne vaut rien.
Michel Michel était bien décidé à y voir plus clair. Il n’était pas du genre à se faire musker™.