“Banking is very good business if you don't do anything dumb." - Warren Buffett
Dans Le soleil se lève aussi, Ernest Hemingway avait imaginé un dialogue entre deux vétérans alcooliques dans lequel Bill Gorton demandait à Mike Campbell comment ce dernier avait fait faillite. Campbell répondit : « Graduellement d'abord, et puis brusquement ».
La faillite de Silicon Valley Bank (SVB) n’a pas manqué de marquer ces deux étapes, ici imagées par Visual Capitalist.
Le graphique ci-dessus reprend quelques éléments ayant mené à l’effondrement de la banque, dont la vente massive d’actions par son management et l’évaluation revue à la baisse de Moody’s. Malgré ces récents développements, KPMG, l’auditeur de la banque depuis 1994 a émis une opinion sans réserve le 24 février dernier, estimant ainsi que la banque ne risquait pas de faire faillite dans le cours des 12 prochains mois.
La situation est expliquée dans le Wall Street Journal :
Auditors are supposed to warn investors if companies are in trouble. They are required to evaluate “whether there is substantial doubt about the entity’s ability to continue as a going concern” for the next 12 months after the financial statements are issued.
Auditors also use their reports to highlight “critical audit matters” that involve challenging, subjective or complex judgments. KPMG in that section of its report focused on the accounting for credit losses at Silicon Valley Bank. But it didn’t address Silicon Valley Bank’s ability to continue holding debt securities to maturity—which, in the end, the bank lacked.
Dommage.
Pourtant, outre les éléments évoqués ci-dessus, d’autres indices étaient là pour alerter l’auditeur et les investisseurs :
Recommandé par Jim Cramer
Le journaliste de CNBC, Jim Cramer, se trompe si souvent qu’un fond a été créé pour suivre ses recommandations… à l’envers.
Pour l’instant, c’est un succès : l’investisseur qui réplique l’opposé de ce qu’il recommande performe mieux que l’indice américain S&P 500.
Le fait que Jim recommande le titre le 8 février dernier aurait dû les alerter.
Classé dans Forbes
Tout comme une apparition dans un classement Forbes.
Un ancien de Lehman Brothers
Ou encore une gestion assurée par les spécialistes de faillites bancaires.
Cette faillite n’est toutefois pas un problème étant donné que le gouvernement américain a annoncé venir garantir l’ensemble des dépôts des banques en difficulté, sauvant ainsi les capital-risqueurs qui se rendent compte qu’ils n’avaient en fait pas pris de risque.
Les cafards n’étant jamais seuls, SVB a entrainé dans sa chute d’autres banques régionales américaines et les banques européennes dévissaient à leurs tours en milieu de semaine, emmenées par le fleuron helvétique Credit Suisse, dont le titre s’échangeait même à la place de la Riponne mercredi soir.
La Vieille Dame de la Paradeplatz souffrait à la fois de la contagion du secteur bancaire, mais également des balles tirées dans ses propres pieds :
Dernier en date, on notera l’exploit d’avoir une opinion défavorable de son système de contrôle interne, chose aussi rare dans le monde feutré des comités d’audit de banques cotées en bourse que celle de retrouver des passagers armés sur un vol à destination de New York.
Tous ces évènements ont bien entendu réjoui les crypto-enthousiastes qui voyaient les banques s’effondrer tout en regardant le bitcoin reprendre quelques couleurs.
Enthousiastes qui semblent avoir oublié que le seul moyen de convertir leurs jetons de casino en dollars, en euros ou en francs, est par l’intermédiaire… d’une banque.
Mais laissons-les profiter de ces quelques jours de gloire et d’espoir.
La suite pour eux risque également de ressembler à une conversation imaginée par Hemingway : graduellement d’abord, et puis brusquement.
Pas sûr cependant que les Banques Nationales leur viennent en aide.